En 2024, la Garantie individuelle du Pouvoir d'Achat (GIPA), un dispositif essentiel pour les fonctionnaires depuis sa mise en place en 2008, va disparaître. L'annonce de cette suppression par Guillaume Kasbarian, ministre de la fonction publique, a suscité de vives réactions parmi les agents de l'administration publique et les organisations syndicales. Dans cet article, nous allons décortiquer les raisons de cette décision, ses conséquences pour les fonctionnaires, et les réactions qu'elle a provoquées.
Qu'est-ce que la GIPA ?
La Garantie individuelle du Pouvoir d'Achat (GIPA) est un dispositif mis en place pour compenser les fonctionnaires dont le traitement indiciaire a évolué moins vite que l'inflation sur une période donnée. En d'autres termes, il s'agissait d'une compensation financière visant à maintenir le pouvoir d'achat des fonctionnaires, face à l'érosion monétaire. Depuis sa création, la GIPA a joué un rôle fondamental pour les agents les plus impactés par le gel du point d'indice, notamment durant les années de crise économique.
Les raisons de la suppression de la GIPA en 2024
Guillaume Kasbarian, dans une annonce qui n'a laissé personne indifférent, a confirmé la suppression de la GIPA pour l'année 2024. Le ministre a justifié cette décision par la nécessité de revoir les mécanismes de revalorisation salariale dans la fonction publique, en les adaptant aux nouvelles réalités budgétaires. Selon lui, le gouvernement prévoit de mettre en place un système plus ciblé et plus efficace pour soutenir le pouvoir d'achat des agents, en se concentrant sur les catégories les plus vulnérables.
La réforme du point d'indice et l'augmentation générale prévue seraient, selon le ministre de la Fonction Publique, des solutions plus équitables que la GIPA, qui présentait certaines inégalités dans son mode de calcul et son application. Toutefois, ces arguments n'ont pas convaincu les syndicats, qui considèrent cette suppression comme une perte de garantie importante pour les agents, notamment ceux qui n'ont pas connu de progression de carrière récente.
Conséquences pour les fonctionnaires
La suppression de la GIPA signifie que les agents dont le traitement n'évolue pas au rythme de l'inflation ne recevront plus de compensation automatique. Pour beaucoup de fonctionnaires, notamment ceux proches de la retraite ou ceux situés dans des catégories à faible évolution indiciaire, cela représente une érosion certaine de leur pouvoir d'achat. Certains syndicats estiment que cette mesure va toucher de plein fouet les agents de catégorie C et B, qui sont souvent les moins bien rémunérés et dont l'évolution de carrière est limitée.
Pour tenter d'apaiser les inquiétudes, le ministre a évoqué la mise en place de dispositifs alternatifs, comme une revalorisation plus fréquente du point d'indice et des primes pour les catégories prioritaires. Cependant, ces promesses laissent sceptiques de nombreux observateurs, qui y voient des mesures incertaines et non garanties, contrairement à la GIPA, qui était un mécanisme automatique.
Réactions des syndicats et des fonctionnaires
La réaction des syndicats ne s'est pas fait attendre. La plupart des organisations syndicales ont exprimé leur désapprobation face à cette décision, la qualifiant de "coup porté au pouvoir d'achat des fonctionnaires". Pour eux, la GIPA représentait une garantie importante, surtout dans un contexte où le gel du point d'indice a été prolongé pendant de nombreuses années.
Les agents eux-mêmes se disent inquiets. Pour beaucoup, la GIPA était un filet de sécurité dans un environnement où les revalorisations salariales sont rares. Certains craignent que cette suppression ne soit qu'une étape supplémentaire vers une précarisation accrue de la fonction publique, avec des salaires qui peinent à suivre le coût de la vie.
Vers un avenir incertain
La suppression de la GIPA pose la question plus large de l'attractivité de la fonction publique. En effet, dans un contexte où de nombreux secteurs cherchent à attirer des talents, la réduction des garanties salariales pourrait rendre la fonction publique moins attractive. Cette situation pourrait accroître les difficultés de recrutement déjà rencontrées dans certains métiers, notamment ceux de la santé et de l'éducation.
Le gouvernement devra être attentif à l'évolution de la situation et prévoir des mesures compensatoires efficaces pour éviter une crise de motivation et d'attractivité au sein de la fonction publique. La promesse d'une revalorisation du point d'indice est un premier pas, mais les fonctionnaires et leurs représentants attendent des actes concrets.
La suppression de la GIPA en 2024 marque la fin d'un dispositif qui, malgré ses imperfections, était considéré comme une garantie importante pour les fonctionnaires. Les promesses de revalorisation du point d'indice et de nouvelles mesures ciblées suffiront-elles à compenser cette perte ? Rien n'est moins sûr. Les prochains mois seront décisifs pour mesurer l'impact de cette décision sur le pouvoir d'achat des agents publics, et il est probable que les tensions entre le gouvernement et les syndicats s'intensifient.
Avis de www.naudrh.com : la suppression de la GIPA risque de creuser un fossé encore plus grand entre le gouvernement et les fonctionnaires. Les agents publics, souvent en première ligne, se sentent déjà peu reconnus, et cette mesure, bien qu'accompagnée de promesses de compensation, pourrait accroître leur sentiment de dévalorisation. Pour maintenir la confiance et la motivation au sein de la fonction publique, le gouvernement devra rapidement mettre en place des mesures tangibles et visibles.
Par Pascal Naud
Président de l'association www.naudrh.com
Editorialiste / expert statutaire
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