Alors que l’été s’annonce à haut risque, d’importants moyens de lutte contre les incendies devraient être déployés et la population peut désormais compter sur la « météo des forêts ». Au niveau local, les maires sont en première ligne, tout en ne disposant que de très peu d'outils juridiques. La guerre du feu se gagnera-t-elle sans eux ? Pas si sûr.
A l’approche de l’été, les services de secours et d’incendie sont dans les starting-blocks. Les services de l’Etat aussi. Les maires, pourtant en première ligne, sont, quant à eux, parfois démunis d’outils juridiques pour prévenir les feux de forêts.
Le principal dispositif qu’ils peuvent solliciter est l’obligation légale de débroussaillement (OLD), en vigueur dans les départements les plus exposés, sous le contrôle des préfets. Loin d’être anecdotique, l’OLD est le facteur le plus important en termes de défendabilité, comme l’a expliqué récemment à « La Gazette » le contrôleur général Eric Grohin, directeur du service départemental d’incendie et de secours du Var.
Concrètement, ce système d’autoprotection est à la charge des personnes concernées : les administrés pour leurs habitations, le maire pour les bâtiments communaux, le conseil départemental pour les routes départementales… Charge ensuite au maire de le faire respecter et de mettre en demeure les personnes concernées.
Sensibiliser aux obligations de débroussaillement
Mais, sur le terrain, sa mise en œuvre reste variable. Par méconnaissance, manque de moyens, ou tout simplement réticence, l’OLD n’est pas encore rentrée dans les mœurs. Pour sensibiliser les habitants, les maires sont tenus d’organiser une réunion d’information. De nombreuses ont eu lieu ces derniers mois à Biganos, Uzès, Lacanau…
« En mars dernier, environ 20 % de la population était présente, estime Laurent Agator, maire de Vimenet [Aveyron], qui avait aussi convié le capitaine du Sdis [service départemental d’incendie et de secours, ndlr]. Les gens avaient déjà entendu parler de cette obligation mais ils ne savaient pas comment faire. A date, certains ont déjà commencé à débroussailler. Je pense que nous allons laisser encore un peu de temps et, ensuite, nous enverrons un courrier d’incitation avant de faire de la répression. » En cas de refus, le maire peut effectuer une mise en demeure. La commune prend alors en charge les travaux aux frais des propriétaires. Par ailleurs, les contrevenants risquent des sanctions pénales et administratives pouvant aller jusqu’à 30 euros par mètre carré non débroussaillé et subir un malus sur le remboursement par les assurances en cas de sinistre.
Une proposition de loi, en cours d’adoption, permettrait notamment de rendre obligatoire l’indication par les communes des « périmètres des terrains concernés par les OLD sur un ou plusieurs documents graphiques », et d’annexer ceux-ci au plan local d’urbanisme ou à la carte communale.
FOCUS
Ne pas sous-estimer les documents d’urbanisme
Si le code de l’urbanisme ne contient pas de disposition spécifique à la prévention des feux de forêt, à la différence de son homologue le code forestier, il ne faut toutefois pas sous-estimer le potentiel des documents d’urbanisme en la matière.
En effet, comme le précise clairement l’article L.101-2 du code de l’urbanisme, « l’action des collectivités publiques en matière d’urbanisme vise à atteindre plusieurs objectifs définis par la loi ». Parmi eux, figurent la sécurité et la salubrité publiques, la prévention des risques naturels prévisibles, tels que les feux de forêts et la protection des milieux naturels. « Cela revient concrètement à dire au maire que l’ensemble des documents d’urbanisme qu’il adopte ou révise doit prendre en compte ces trois impératifs », explique Philippe Peynet, avocat spécialiste du droit de l’urbanisme au sein du cabinet Goutal, Alibert et associés.
« Ainsi, toute révision d’un plan local d’urbanisme devra prendre en compte le risque incendie, d’autant plus si celui-ci concerne des territoires à risques », poursuit l’avocat.
Ces territoires se voient d’ailleurs imposer un plan de prévention des risques d’incendies de forêts (Pprif) qui, comme son nom l’indique, est un document concourant à la prévention des risques d’incendies de forêts figurant en annexe du plan local d’urbanisme.
Enfin, le maire peut également compter sur quelques autres leviers issus du code de l’urbanisme, comme les emplacements réservés. Selon Philippe Peynet, « ce bon vieil outil d’aménagement peut aider un maire, par exemple, à prévoir des élargissements de voie afin de faciliter l’accès des services de secours ».
Prendre des arrêtés de police
Pour protéger le territoire et ses habitants, les maires peuvent également user de leurs pouvoirs de police générale, en vertu de l’article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales.
Ainsi, l’année dernière, le maire de Jarrier (Savoie), Marc Picton, avait interdit, via un arrêté municipal, l’accès à une partie du territoire communal, en précisant que la randonnée sous toutes ses formes (pédestre, équestre, VTT et motorisée) était proscrite. Seuls les ayants droit, comme les agriculteurs et les propriétaires, restaient autorisés.
De son côté, après plusieurs incendies dans des communes proches du Jura, la municipalité d’Oyonnax (Ain) avait, elle aussi, réglementé l’accès au massif forestier.
Mais ces interdictions sont peu fréquentes et le plus souvent prises par les préfets. Dans le Gard, la préfète vient d’ailleurs de soumettre à la consultation publique un projet d’arrêté permettant de réglementer l’accès aux massifs forestiers entre le 15 juin et le 15 septembre en fonction des conditions météorologiques et du risque des feux de forêt.
Source La gazette des communes
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